L’expression « le sel de la vie » reflète toutes ces petites choses minuscules qui suffisent à transformer le fade du quotidien en savoureux ou harmonieux. Que serait notre vie sans sel?
Du plus loin qu’on remonte dans l’Antiquité, le sel est présent dans la vie de l’homme et sa manière de se nourrir et de conserver les aliments. Sa production et sa commercialisation furent d’ailleurs organisées par les autorités pour éviter la spéculation et la pénurie. De véritables infrastructures commerciales furent mises en place pour le sel. C’est un des rares produits alimentaires sur lequel, dans de nombreuses civilisations, un impôt fut levé comme la gabelle ou le salignon. Le sel a d’ailleurs servi de monnaie d’échange à différentes occasions dans l’Antiquité. Le mot « salaire » vient du même mot pour ce que, dans l’ancienne Rome, il désigna l’indemnité en argent versée pour acheter le sel (salarium argentum) et les vivres, la solde elle-même avec les prestations en nature, et finalement, par extension, toute forme de rétribution du travail.

Si le congélateur et la boîte de conserve ont aujourd’hui pris le relais, il n’y a pas si longtemps, on confiait au sel le soin de préserver les aliments : la viande (plats de côte de porc), la charcuterie (jambon), mais aussi les légumes tels que les choux et les navets, sans oublier le poisson (anchois, hareng et morue).
A côté du gros sel présenté sur la table pour accompagner une viande de pot-au-feu et le sel fin de nos salières, la mode a lancé, il y a quelques années, la Fleur de Sel, croûte blanche superficielle ramassée avec soin dans les marais salants et le plus célèbre restant celle de Guérande.
Lors de mon séjour à Paris, je suis restée médusée par la taille des gondoles réservées au sel dans les épiceries fines ou les rayons des Galeries Lafayette et ceux du Bon Marché. Je ne parle pas du conditionnement qui va de l’emballage en carton au flacon de cristal type parfum précieux, sans oublier toutes les fanfreluches telles que cordelette de chanvre, nœud en raphia, petit mouchoir en jute ou vichy coloré, sachet en papier recyclé écolo destinées surtout à faire monter le prix… Non, je parle du produit « sel ».

Chaque pays producteur se rengorge de produire le meilleur, le plus iodé, le plus typé, le plus goûteux… En dehors de la Camargue, jugez-en plutôt :
- Sel bleu de Perse : outre sa couleur, sa saveur est surprenante, avec des notes d’abord très salées qui dérivent ensuite vers des touches épicées. Parfait avec les viandes rouges.(5 euros les 50 grammes tout de même !!!).
- Sel rose de l'Himalaya : reminéralisant et détoxinant, il accompagne parfaitement les viandes, poissons et légumes.
- Sel Alaea d’Hawaï : mélange de sel de l'archipel de Molokai à Hawaï, et d'argile volcanique (alaea) riche en oxyde de fer. Idéal sur des légumes cuits à la vapeur, sur un fromage blanc ou sur un rôti de porc.
- Sel d’Uyuni (Bolivie): parfait dans un bouillon, un potage ou en touche finale sur une viande grillée
- Sel de Maras (Pérou) : ce sel, originaire d’étangs situés à 3500 mètres d’altitude, peut s’utiliser dans les salades, viandes ou pâtes.
Tous ces sels tirent leur couleur de particules insolubles lors de la cristallisation.
Mais la variété ne s’arrête pas là. Il y a aussi les sels épicés, obtenus par des mélanges de sel et d’épices ou d’herbes finement broyées, parfois torréfiées. Nous connaissons déjà bien le sel de céleri qui relève le Bloody Mary.
Connaissez-vous le Gomasio, mélange de sel et de graines de sésame, doucement grillées. Et le sel au thé vert matcha ? Et celui au piment d’Espelette, qui donne un éclat particulier à un fromage de brebis ? Et l’autre, à la coriandre, qui parfume élégamment les sauces tomate et fait merveille dans la soupe de carottes ou de potiron ?
Il y a enfin le sel fumé dont les cristaux, issus de l'océan Pacifique, sont patiemment fumés au feu de bois d'aulne rouge et aromatisent omelettes et pavés de saumon. Il en existe un autre provenant de Norvège, enrichi d’oignons et de curry, avec lequel on parfume le beurre.

Je vous livre une petite recette sympathique, délicieuse sur une salade de tomates : le sel au vinaigre balsamique.
Dans une casserole, faire réduire 50 ml de vinaigre balsamique, sans le laisser devenir sirupeux, jusqu'à ce qu'il en reste environ 3 cuillères à soupe.Mélanger le vinaigre réduit avec 3 cuillères à soupe bombés de gros sel et le répartir sur une plaque allant au four et tapissée d'un tapis en silicone. Mettre au four pour 30 à 40 mn à 130° en le mélangeant régulièrement à la fourchette pendant la cuisson.Lorsque le sel est bien sec, le laisser refroidir, ajouter les 3 cuillères à soupe de gros sel nature et passer dans un petit mixer ou au mortier.Conserver dans un bocal bien hermétique.

Pour mémoire, je vous livre quelques expressions bien de chez nous qui démontre, s’il en était encore besoin, l’importance de ce produit.
C'est comme une soupe sans sel ; Mettre son grain de sel ; Mettre du sel sur la plaie ; Une note salée ; Une blague salée ; Poivre et sel ; Le sel de la vie ; Vous êtes le sel de la terre …