dimanche 6 décembre 2009

GRIPPE ET VIN CHAUD

Nous venons de recevoir de l’ambassade l’annonce d’une campagne de vaccination contre la grippe H1N1 pour les Français résidant au Panama. Parallèlement, la presse française annonce la distribution prochaine gratuite de Tamiflu, médicament présenté comme l’unique panacée contre cette malédiction qui s’ajoute à la crise économique et au réchauffement de la planète pour achever de nous saper le moral…


Quand on s’intéresse d’un peu plus près au Tamiflu, on s’aperçoit que la molécule efficace du produit est extraite de ….je vous le donne en mille… la Badiane de Chine qui n’est autre que notre anis étoilé. En chinois, on l’appelle « shikimi ».Pour faire court et le plus clair possible, on extrait de la badiane l’acide shikimique et, à partir de cet acide, on synthétise l’oseltamivir, un antiviral qui neutralise l’enzyme du virus qui attaque les parois des cellules de notre corps.

Je ne suis pas d’un tempérament pessimiste, mais, il y a quelques mois, alors que la rumeur se faisait alarmante sur le développement foudroyant de cette grippe et que nous nous sentions un peu oubliés ici, j’avais commencé à stocker de l’anis étoilé en me disant que, à défaut du médicament, nous pourrions toujours boire de la tisane… La consule nous ayant rassurés quant aux stocks de pilules et de masques disponibles, je me retrouve avec un plein bocal de petites étoiles parfumées à écouler.
                  
L’anis étoilé, avant d’être une épice à l’arôme puissant, est le fruit d’un arbre toujours vert qui peut atteindre les 6 mètres de hauteur et qui produit de jolies fleurs en forme de narcisse. Il faut attendre 6 ans pour que l’arbre commence à donner des fruits, mais il va produire pendant 100 ans !! En 2007, la production mondiale de badiane a été de 40 000 tonnes et 90% de cette production proviennent essentiellement de Chine. On fait 2 récoltes par an. Les étoiles sont ramassées avant maturité et mises à sécher sur des claies.


La badiane se conserve très bien et longtemps quand elle est entière : broyé, ses qualités s’altèrent. Avec le poivre Séchouan (ou le gingembre), la cannelle, le clou de girofle et le fenouil, elle rentre dans la composition du cinq-épices, très utilisé dans la cuisine asiatique.

En Europe, l’anis étoilé entre dans la fabrication du pastis et l’ouzo. En pâtisserie, il parfume les crèmes pâtissières, les panacottas et les cakes. En Allemagne, on l’ajoute aux marmelades. Comme il a une action reconnue sur les digestions difficiles, il aromatise les apéritifs et les digestifs.



A part la tisane que j’aime bien, mais qui a ses limites, je l’utilise pour pocher mes poires avant de les recouvrir de chocolat noir. Dans un sirop, je mets 2 ou 3 étoiles, un bâton de cannelle et une gousse de vanille fendue. À l’ébullition, je plonge délicatement mes poires épluchées et je les laisse cuire à tous petits bouillons. Notez que la maison en est délicieusement parfumée…


Puisque nous sommes entrés en période de Noël et que se développent les marchés traditionnels, on ne peut pas parler de l’anis étoilé sans évoquer le vin chaud aux agrumes et aux épices.

Versez un bon vin rouge dans une casserole (je laisse la quantité à votre appréciation), ajoutez-y une lichette de gin ou un autre alcool fort et portez à feu moyen. Inclinez légèrement la casserole pour que la flamme atteigne les vapeurs d’alcool et que le mélange flambe à la surface. Attention à vos cheveux !!! Ajoutez alors du sucre en poudre, 1 ou 2 bâtons de cannelle, 1 clou de girofle, 3 grains de poivre, les zestes d’une orange et d’un citron, un peu de gingembre en poudre et de noix muscade. Laissez mijoter pendant 15 à 20 minutes et filtrez.

Quand il fait bien froid, le plaisir est de serrer les mains autour du mug, de respirer les vapeurs pour en récupérer tout le parfum et de boire à petites goulées le vin brûlant pour sentir exploser en bouche la saveur des épices sucrées.

                  
Au Panama, on ignore ces journées froides, mais je peux vous assurer que certains magasins s’attachent à reconstituer l’atmosphère glaciale des congélateurs avec la climatisation à outrance : qu’attendent-ils pour nous offrir un bon vin chaud à la caisse ?